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Platsch !
3 décembre 2008

Baader Meinhof Simplicissimus

Qu'est-ce qu'un terroriste ouest-allemand ? C'est un guignol, une bête de foire, un monstre de la société de marché.  Il ne pense pas ; il agit. Ou s'il pense, il délire.

    Voyez comme il va sa route. Surgi de nulle part comme un diable, il a toujours un bolide où sauter d'un bond pour rouler à tombeau ouvert. Est-ce que c'est un homme ? Ses yeux sont là pour viser, ses mains pour tuer, ses jambes pour fuir. Il n'est rien sans la mort. Il passe sa vie à lustrer des revolvers, planifier des attentats, dévaliser des banques en pattes d'eph, et regarde le résultat à la télévision en fumant du tabac, pendant que ses comparses promènent leurs gros seins nus au milieu des explosifs. Voilà tout le film d'Uli Edel, Baader Meinhof Complex, ou plutôt Baader Meinhof Simplicissimus ;  on devine bien que la guérilla urbaine est devenue, aujourd'hui, un spectacle folklorique. De moyen de contestation, la guérilla est devenue un moyen de divertissement.

Baader Meinhof Complex nous en apprend beaucoup sur notre époque, à la fois par les faits qu'il grossit et par ceux qu'il efface. Depuis un moment, on assimile terrorisme et arabie ; on a donc imaginé de filmer les loustics de la bande à Baader dans des camps du Moyen-Orient, où entre deux séances d'entraînement à la guérilla, ils se promènent évidemment tout nus en plein soleil, comme n'importe quel Allemand qui se respecte.

    Pour seul complice, l'Arabe. Pour seule référence, Mao. Pour unique revendication, la libération des peuples opprimés. Pour seul adversaire, l'impérialisme américain. Pour tout résultat, le meurtre d'innocents. Le terroriste ouest-allemand fauche ses compatriotes au nom de causes étrangères, et avec le soutien de parfaits métèques ; qui oserait en douter ?

 

    Dans cette Allemagne fantômatique de Baader Meinhof Complex, il n'y a finalement qu'un petit combat à mort entre des terroristes enragés et des brutes policières. De l'Allemagne, on ne dit rien ;  réduite à une série de locaux où la violence se déchaîne tôt ou tard (que ce soit dans les prisons, les commissariats, les caches et appartements de la RAF, les banques, les entreprises, les maisons de particuliers peu importe), l'Allemagne de l'Ouest est un monde habité suspendu dans le vide, une cité tentaculaire sans culture ni passé, un univers sans aucune histoire et dont on sait seulement que la population roule en automobile.

    Un vertigineux trou noir semble avoir pompé, aspiré, syphonné la DDR et ses complicités avec la Rote Armee Fraktion... Par miracle, l'entretien entre Sartre et Baader a disparu des registres. Les analyses de Reich, Adorno et Horkheimer qui ont influencé les terroristes ? Volatilisées dans l'espace intersidéral. - Le fiasco de la dénazification, si propice à l'amalgame entre nazisme et capitalisme ? Herrlein Schleyer lui-même, sans doute pour les bons et loyaux services qu'il a rendus à la patrie du temps où il jouait au SS, est déguisé en représentant du patronat injustement assassiné...  

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